«Wittenheim qui pleure nos soldats et une cinquantaine de victimes civiles, est devenu inhabitable. Les habitants restés là-bas vont être évacués sur Mulhouse. »
« L'Alsace », mardi, le 6 février 1945.
Eh bien non les habitants de Wittenheim n'ont pas voulu être évacués. Ne sachant emporter leurs ruines à1a semelle de leurs souliers, ils ont préféré se cramponner à eux, essayant de leur redonner la chaleur et la vie. Leur nombre s'élevant, durant l'annexion, à 7.000, ils se chiffrent toujours à 6.500 - ou 1.791 ménages -. Tous ces ménages vivent, au prix de pires privations, en vérité dans leurs ruines ; ce que confirment les chiffres suivants
De 1.440 maisons en 1939
132 sont complètement détruites
557 sont endommagées plus de 50 %
751 sont endommagées plus de 10 à 50 %
II en résulte qu'aucune maison d'habitation n'a été épargnée par la guerre. Sans compter les sinistrés en meubles, vêtements, linges, chaussures, etc... ni les spoliés, les registres de Wittenheim-Martyre mentionnent
853 personnes sinistrées totales (dont le logement est entièrement détruit)
3.104 personnes sinistrées partielles (dont le logement est partiellement endommagé).
Parmi les édifices publiques qui ont le plus souffert, il y a lieu de citer :
La Mairie : endommagée de 50 à 100 % (le service communal a été transféré à l'école des filles) ;
L'école des garçon du village : endommagée de 50 à 100 % ;
L'église catholique Sainte-Marie datant du 18e siècle (1780) : incendiée et complètement détruite (le service religieux se tient dans le couloir de l'école des filles).
L'église catholique Sainte-Barbe : endommagée de 50 à 100 % (une salle de l'école maternelle la remplace) ;
Les bains municipaux : endommagés de 50 à100 % ;
Le chantier municipal : endommagé de 50 à 100 % ;
Le poste de police : complètement détruit ;
Le pont-bascule et les W.C. publics : entièrement détruits ;
La morgue avec W.C. au cimetière : complètement démolis ;
Le dépôt des motos-pompes à incendie : endommagé de 50 à 100 % ;
L'ancien château des comtes d'Andlau, datant du 18e siècle, transformé en école ménagère « Don Bosco » : complètement détruit ;
L'industrie de notre commune fut également gravement éprouvée.
Mine Anna : complètement détruite. Les travaux pour la reconstruction seront très longs, et une production de potasse ne peut être envisagée que d'ici plusieurs années.
Mine Fernand : gravement endommagée, cependant réparable dans un laps de temps pouvant s'étendre à plus d'une année.
Mine Théodore: endommagée au même pourcentage que la Mine Fernand.
Cités ouvrières Fernand - Anna - Théodore : Les cités ouvrières Fernand-Anna et Théodore ont été gravement endommagées. Cependant sur l'initiative des Mines Domaniales de Potasse d'Alsace, les réparations furent rapidement entreprises de sorte qu'aujourd'hui déjà la plupart des habitations ouvrières sont rendues habitables.
Une grande partie des bâtiments fut complètement détruites, l'autre gravement endommagée. La reprise de l'affaire ne pourra être prise en considération, qu'après des réparations très importantes.
La conduite d'eau et la canalisation ont été gravement endommagées. Toute fois, grâce à l'activité du service communal, les dégâts causés à ces installations sont réparés, et celles-ci servent actuellement à nouveau à la population.
La conduite à gaz venant de Mulhouse, ne peut être utilisée, vu que le pont sur l'Ill prés d'Illzach, qui porte les conduits maîtresses, a été démoli par les Allemands en 1944.
Par ce fait, les besoins de la population en combustibles (bois et charbons), se sont considérablement augmentés. Le ravitaillement en bois et en charbon étant très difficile, la population se trouve en proie à de sévères difficultés.
A l'époque le courant électrique fait encore défaut dans plusieurs rues.
Les cultivateurs furent durement frappés. 35 % des immeubles agricoles, surtout les granges et les étables, ainsi que les stocks en froment, paille, foin, pommes de terre, etc., furent la proie des obus incendiaires.
Bétail : De 77 chevaux il en reste encore 19. Le total des vaches laitières se montant avant la guerre à 205, fut réduit à 74. De 348 porcs il n'en reste plus aucun.
Les terrains devenus incultivables par suite de la pose de mines, des dévastations de la guerre, du manque de la main-d'œuvre et des machines agricoles forment un total de 192 hectares 80.
La ligne des tramways, seul moyen de communication entre Wittenheim-Mulhouse et les communes environnantes, n'a pu être rétablie partiellement qu'au mois de novembre 1945.